L’établissement pénitentiaire de Huy
L’établissement pénitentiaire de Huy

L’établissement pénitentiaire de Huy

Vanessa Matz (Les Engagés): Monsieur le secrétaire d’Etat, ma question est un peu plus récente que celle de mon collègue. Elle date du 21 février et concerne l’établissement pénitentiaire de Huy.

Le bourgmestre de Huy a pris le 19 février un arrêté de fermeture pour la prison de Huy. Cela fait des années que l’état de vétusté de l’établissement inquiète les autorités communales et le milieu judiciaire de manière large. Le dernier rapport incendie des pompiers serait accablant, pointant 66 infractions au niveau de l’installation électrique. Ce rapport confirme par ailleurs que la structure du bâtiment n’est plus du tout aux normes actuelles en matière de sécurité. Ce sont des problèmes qui ne sont évidemment pas neufs mais font l’objet de promesses depuis plus de vingt ans, une situation d’autant plus alarmante que la surpopulation carcérale est constante au sein de l’établissement. Le bourgmestre déclare: « Normalement, 63 prisonniers peuvent être détenus dans la maison d’arrêt de Huy. Néanmoins, nous sommes très fréquemment à près de 100 prisonniers détenus. Est-ce que l’on s’imagine la surpopulation au sein de cet établissement? Tous les problèmes que cela provoque au sein même de la vie et au quotidien dans cette prison? » Je pense que les récents événements ne vont pas nous contredire.

L’arrêté prévoyait un délai de dix jours. Sauf si un accord est intervenu entre le dépôt de ma question et ce jour, celle-ci pourrait être fermée ou sur le point de fermer. Cela ne peut que nous inquiéter alors que la situation est critique dans toute la région. Alors que le budget total des travaux s’élèverait entre 19 et 24 millions, 600 000 euros auraient été débloqués pour les travaux!

Monsieur le secrétaire d’Etat, quels travaux entendez-vous entreprendre à brève échéance et à plus long terme? Quelles seraient les responsabilités si une défaillance électrique devait entraîner un accident ou un incendie?

Mathieu Michel, secrétaire d’État: Madame la députée, monsieur le député, il y a deux volets dans le dossier de la prison de Huy. Premièrement, à court terme, je vous confirme que la Régie des Bâtiments et la Direction générale des Etablissements pénitentiaires (DG EPI) ont reçu un courrier émanant du bourgmestre de la ville de Huy leur signalant une série de manquements identifiés par le Service régional d’incendie lors d’une visite de contrôle. Très rapidement, la Régie des Bâtiments en concertation avec la DG EPI et leur structure Infrastructures a établi un plan d’action reprenant les différents travaux à réaliser pour chaque manquement.

Ce plan d’action signé par le ministre de la Justice et moi-même a été transmis au bourgmestre de Huy dans le timing demandé et a ensuite été présenté dans les détails lors d’une réunion avec le bourgmestre le 1er mars. À l’occasion de cette réunion, le bourgmestre a imposé unilatéralement des deadlines majoritairement étalées sur l’année 2024 pour chacun des travaux à réaliser avec arrêté de fermeture si l’une de ces deadlines n’était pas respectée.

On peut clairement regretter que certaines de ces deadlines soient irréalisables compte tenu, entre autres, de la législation sur les marchés publics, du temps d’obtention des commandes, etc. Cette situation est d’autant plus intenable que la position de l’Inspection des finances ne reconnaît pas, du point de vue de la législation des marchés publics, le caractère urgent dans l’organisation de ces travaux. La fermeture de la prison n’est donc pas inévitable si le bourgmestre nous laisse le temps d’effectuer les travaux dans des délais raisonnables.

Concernant le fait que ces travaux n’aient pas été réalisés en 2022, la Régie des Bâtiments a souhaité statuer en premier lieu sur les travaux de rénovation prévus dans le plan pluriannuel d’investissement (PPI) qui englobe ces travaux pour répondre aux manquements en matière de prévention d’incendie. Le montant estimé pour la réalisation des premiers travaux annoncés dans le plan d’action proposé au bourgmestre s’élève à environ 900 000 euros TVAC.

Pour rappel, au cours des dernières années, la Régie des Bâtiments a fait procéder à divers travaux relatifs à la sécurité au sein de la prison de Huy comme le placement de plusieurs portes coupe-feu notamment dans la buanderie, dans les cuisines ou encore dans les espaces cellulaires et dans les ateliers, le placement d’un système BIM dans les ailes cellulaires ainsi que la mise en conformité dans l’installation au gaz pour la chaufferie principale.

Deuxièmement, le long terme. Les travaux de rénovation de la prison de Huy sont repris dans le plan pluriannuel d’investissement de la Régie des Bâtiments pour un budget qui avait été estimé, au début du PPI, à 20 610 000 euros. Malheureusement, ils sont repris pour après 2026.

Les crédits devront donc être octroyés lors de l’élaboration du budget de l’année 2027. Les travaux ne pourront être réalisés qu’après octroi de ces crédits. C’est une décision concertée avec le ministre de la Justice et les membres du gouvernement qui ont approuvé le PPI. On peut le regretter mais des choix ont été posés en fonction de l’urgence et des moyens financiers et humains.

Concernant la prison de Marneffe, des travaux ont déjà été effectués dans cette prison. Les planchers de la zone administrative au-dessus de la salle des visites ont été renforcés. La cuisine quant à elle ne pose pas de problème. Des travaux électriques ont été réalisés récemment par la Régie des Bâtiments afin de permettre la modernisation d’une partie des appareils de cuisson; la chaudière vapeur qui présentait des pannes à répétition va pouvoir être mise hors service dès la fourniture des nouveaux appareils de cuisson. Dans les ateliers, il reste une chaudière en ordre de marche, qui permet d’assurer le chauffage de l’ensemble des blocs. Enfin, concernant la migration du centre de formation de Marneffe vers Liège, je vous prie de bien vouloir noter que le programme des besoins de la Justice est à l’étude car la tour Paradis à Liège n’est pas en mesure de répondre à 100 % des demandes de la Justice.

De manière plus générale, je rappelle aussi que l’État est son propre assureur. S’agissant de la question de la responsabilité, elle différera en fonction de la nature du manquement. Si le manquement est dû à la Justice, alors ce sera la responsabilité de la Justice, c’est logique. Si le manquement est dû à la Régie des Bâtiments, il s’agira de la responsabilité de la Régie des Bâtiments.

Vanessa Matz (Les Engagés): Monsieur le secrétaire d’État, je me demande si vous et votre gouvernement avez conscience de la poudrière que représentent les différents établissements pénitentiaires avec les conditions de travail du personnel et les conditions indignes dans lesquelles les détenus sont logés.

Depuis le début de la législature, nous clamons qu’il y a un vrai problème dans les établissements pénitentiaires. Oui, nous reviendrons tout à l’heure sur Lantin. Il est effectivement assez paradoxal de pointer du doigt un bourgmestre – qui n’est pas de ma formation politique et je suis très à l’aise pour en parler – ne sachant plus à quel saint se vouer et qui doit entreprendre des mesures de restriction et de fermeture pour assurer des conditions de sécurité. Certes, il y a les questions de marché public. Mais ces questions n’ont peut-être pas été anticipées par votre ministère ou par le gouvernement. Maintenant, on a le nez dessus… évidemment qu’on est trop tard!

Pour ce qui est de la rénovation du bâtiment plus globalement, nous avons à nouveau l’impression que vous vous dites « après moi, les mouches ». Ce ne sera pas pour votre législature et nous verrons bien ce que les autres feront. Je trouve votre attitude loin d’être responsable, d’autant plus au vu de la surpopulation carcérale et des problèmes qu’elle implique. Je ne pointerai pas à nouveau l’évènement dramatique et indigne d’un Etat de droit qui s’est produit à la prison d’Anvers. Le peu d’actions entreprises avec votre collègue de la Justice sous cette législature en matière de rénovation des établissements pénitentiaires est assez éloquent.