La situation à la prison de Nivelles
La situation à la prison de Nivelles

La situation à la prison de Nivelles

Vanessa Matz (Les Engagés): Monsieur le ministre, tant la presse que la Commission de surveillance de la prison de Nivelles dénoncent la situation très problématique à la prison de Nivelles.

J’ai eu l’occasion de m’y rendre lundi après-midi à l’invitation de la Commission de surveillance et j’ai pu constater sur place que ce ne sont pas que des mots. Non seulement le personnel est gravement en sous-effectifs, comme le relatait un rapport de la Commission de surveillance, mais, en outre, le niveau actuel de surpopulation carcérale est tout bonnement inacceptable: 265 détenus au lieu de 192, ce qui veut dire des cellules de 8m² à trois personnes au lieu d’une seule. S’ensuivent des problèmes d’hygiène, la galle, des punaises, et d’autres inconvénients qui rendent la situation totalement indigne.

Cette situation est catastrophique et amène une tension qui devient difficilement gérable pour le personnel. Il semble que les juges d’instruction bruxellois envoient les personnes sous mandat d’arrêt à Nivelles à défaut d’ouverture de la maison d’arrêt de Haren.

Une fois de plus, nous devons dénoncer des conditions de détention indignes, mais également des conditions de travail qui sont totalement intolérables. M. Rudy Van De Voorde, directeur des établissements pénitentiaires, s’exprimait hier dans la presse, notamment au sujet de la prison de Haren. Il indiquait: « il est vrai que le délai entre l’inauguration officielle de la prison et la mise en service a été court. Tout n’a pas pu être testé dans des conditions idéales mais il y avait une certaine pression pour pouvoir utiliser cette capacité supplémentaire le plus rapidement possible ».

Par ailleurs, j’espère que votre réponse à mes questions ne sera pas: « il y a eu un renfort d’agents formés à Mons ». Il apparaît en effet sur le terrain que ce renfort fût momentané, ces agents ayant été rapidement réaffectés à Haren.

Je voudrais aussi savoir, monsieur le ministre, quelle solution urgente vous allez mettre en place pour faire face à cette surpopulation, aux problèmes d’hygiène, aux problèmes de bagarres, etc.

Comment allez-vous résoudre le problème du manque de personnel, quand la maison de Haren sera-t-elle opérationnelle et, en attendant, comment allez-vous résoudre les problèmes dénoncés tant par la Commission de surveillance que par la presse?

Vincent Van Quickenborne, ministre : Chère collègue, en ce qui concerne la surpopulation carcérale, je vous renvoie bien évidemment de manière plus générale aux mesures que j’ai déjà expliquées à de nombreuses reprises au sein de cette commission et sur lesquelles nous continuons à travailler.

Ces mesures agissent, d’une part, sur l’offre d’infrastructure, avec de nouvelles prisons comme Haren et Termonde, ou la rénovation d’établissements existants comme Saint-Gilles et la vieille prison de Termonde, les maisons de détention et les maisons de transition; et, d’autre part, sur la mise en œuvre de la loi pénale pour freiner le flux d’entrée partout où c’est possible.

En effet, il convient d’examiner à chaque fois où cela est légalement possible si, dans le cadre de la détention provisoire ou de peines privatives de liberté, les alternatives à l’incarcération dans une prison sont opportunes. C’est important non seulement à la lumière de la capacité de détention disponible, mais aussi pour réduire les dégâts causés par la détention et le risque de récidive dans le chef du détenu.

Nous avons également essayé de sensibiliser la magistrature à ce sujet au cours de six tables rondes, avec des centaines de participants, et d’examiner dans quelle mesure nous pouvons affiner le cadre légal sans, toutefois, permettre l’impunité par la non-exécution de peines privatives de liberté imposées par les tribunaux ou le fait de libérer et de réintégrer de manière incontrôlée les récidivistes dangereux dans la société.

Malheureusement, force est de constater qu’à Nivelles, mais aussi dans d’autres prisons de Bruxelles et des environs, la proportion de prévenus continue d’augmenter. Ce phénomène pèse lourdement sur le fonctionnement de la maison d’arrêt de Nivelles. Dans la mesure du possible, les condamnés sont transférés vers d’autres maisons d’arrêt; mais ce n’est pas évident, car Nivelles n’est pas la seule prison où ce besoin se fait sentir.

Quant à votre deuxième question, le cadre du personnel de la prison de Nivelles prévoit 169 emplois à temps plein. Sur ce total, 164,4 sont présents. Le cadre est donc pourvu à 97,3 %. Le manque correspondant donc à 4,6 emplois temps plein.

Deux agents supplémentaires commenceront à travailler à la prison le 15 avril, ce qui ramènera le manque à 2,7 équivalents temps plein. Une procédure de recrutement est encore en cours.

Vous savez que nous l’avons prévu dans un nouvel arrêté royal en juillet 2022. Nous voyons les résultats. Le taux d’occupation de postes de personnel en Wallonie dans les prisons est plus haut que jamais dans les dix ou vingt dernières années. C’est une bonne chose.

Troisièmement, comme j’ai déjà eu l’occasion de l’expliquer au sein de cette commission, l’ouverture de la prison de Haren se fait par phases. Au vu de la situation actuelle de Nivelles, mais également de la prison de Saint-Gilles, il a été décidé que la prochaine phase d’ouverture concernera la maison d’arrêt qui, je vous le rappelle, a une capacité totale de 634 places.

Concrètement, il a été décidé que tous les nouveaux détenus préventifs bruxellois seront adressés, le plus vite possible, à l’établissement de Haren. Cette façon d’agir permettra également à tous les partenaires judiciaires d’avoir une vision claire sur l’organisation de la prison. Cela devrait permettre de diminuer rapidement la surpopulation de la prison de Saint-Gilles et d’arrêter immédiatement toute entrée de prévenus bruxellois au sein de la prison de Nivelles, et donc de ramener la population de cette prison à ses niveaux antérieurs.

Vanessa Matz (Les Engagés): Monsieur le vice-premier ministre, je vous remercie pour vos réponses. Nous parlons évidemment d’un moyen terme avec les différentes dispositions que vous avez prises pour trouver de la place non seulement grâce à la rénovation de certains bâtiments mais également dans les maisons de détention.

Vous savez que cela ne répond évidemment pas à l’urgence qu’il y a non seulement à Nivelles et évidemment dans d’autres établissements où la surpopulation est un vrai problème. J’en veux pour preuve aussi la visite à Mons qui n’est pas non plus piquée des vers, si je peux m’exprimer ainsi. Je ne vois pas de solution.

Vous évoquez Haren. La prochaine phase concerne effectivement les personnes en détention provisoire. Quand cette phase d’ouverture de la prison de Haren aura-t-elle lieu? J’ignore si vous l’avez dit. Peut-être ai-je été distraite, auquel cas je vous prie de m’en excuser. Vous avez dit « prochainement » mais j’ignore si nous avons un calendrier qui nous incite à tenir le coup jusqu’à ce moment-là car, si cette situation perdure encore six mois, c’est très problématique pour l’ensemble du personnel mais aussi pour la détention des détenus.

Pour ce qui est du cadre effectif, j’entends que vous avez des engagements complémentaires qui vont arriver et permettre le cadre. Mais, comme moi, vous savez qu’entre la réalité sur papier et ce qui a vraiment lieu, d’importants problèmes se posent, particulièrement à Nivelles, où le taux d’absentéisme est plus élevé que celui d’autres prisons. Nous avons comparé les chiffres. Ce taux d’absentéisme soulève de nombreux problèmes et n’est évidemment pas sans lien avec les conditions de travail dans lesquelles le personnel doit évoluer, sans parler de cette menace permanente, cette bombe à retardement liée à la surpopulation à Nivelles, en raison de laquelle, à tout moment, une mutinerie pourrait survenir tellement les conditions sont pressantes sur les détenus.

Si des mesures à moyen et long termes sont effectivement prises par vous et votre administration, je regrette évidemment qu’aucune mesure concrète ne soit apportée à Nivelles dans l’immédiat pour répondre ne fût-ce qu’à des problèmes de salubrité et de conditions d’hygiène.

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