Projet de loi modifiant la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration et abrogeant la loi du 12 novembre 1997 relative à la publicité de l’administration dans les provinces et les communes
Projet de loi modifiant la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration et abrogeant la loi du 12 novembre 1997 relative à la publicité de l’administration dans les provinces et les communes

Projet de loi modifiant la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration et abrogeant la loi du 12 novembre 1997 relative à la publicité de l’administration dans les provinces et les communes

Vanessa Matz (Les Engagés): Madame la ministre, je pense que nous avons déjà eu de très nombreux échanges sur ce dossier et vous n’ignorez probablement pas toute la frustration et même davantage, le grand mécontentement par rapport à la façon dont ce dossier a été mené. Vous aviez en effet, excusez-moi, un boulevard! Un boulevard pour envoyer un signal au citoyen, aux associations, pour leur dire que vous aviez entendu ce qui se passait. On entend que les citoyens demandent plus de transparence à leur représentants politiques de manière générale. Au lieu de cela, vous vous êtes enfermée, avec votre gouvernement, dans une perpétuation de ce qui se faisait avant, comme si de rien n’était: « on règle nos petites affaires entre nous et, au fond, il n’est pas nécessaire que quelqu’un d’autre s’en mêle et pose une question ». C’est évidemment extrêmement dommageable pour la démocratie, pour la transparence, pour la participation et aussi pour la confiance que nous devons, nous politiques, tenter de rétablir par un certain nombre de comportements et d’actes que nous posons.

Le projet de loi sur la publicité de l’administration n’est évidemment pas à la hauteur de l’enjeu fondamental que constitue la transparence de l’administration dans une société contemporaine. Il consacre un niveau de transparence nettement moins important que celui qui prévaut dans les entités fédérées et même, à certains égards, en recul par rapport à la situation actuelle. Le projet de loi introduit en effet de manière très vague des motifs d’exception visant à limiter drastiquement la transparence des documents détenus par les cabinets ministériels. Pourtant, les cabinets ministériels sont soumis à la transparence administrative depuis 2004 en Flandre et depuis 2019 en Wallonie, à Bruxelles et en Fédération Wallonie-Bruxelles et, ce, sans que cela ne les empêche de fonctionner depuis dix-neuf ans en Flandre et depuis quatre ans dans les autres entités fédérées.

Notre souci majeur porte sur les décisions de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) qui sont non contraignantes dans votre projet. Cela implique que, face à un refus de l’administration d’exécuter une décision de la CADA, l’administré n’a d’autre choix que de recourir à une procédure judiciaire longue et coûteuse. Cette position est évidemment incompréhensible.

À plusieurs reprises, vous avez tenté de donner un semblant de réponse à cela. La principale réponse que vous avez voulu donner – et je l’ai entendu venir de la même manière du groupe Ecolo-Groen tout à l’heure – consiste à dire qu’il n’y a pas assez de moyens budgétaires. C’est évidemment faux. Comme on le sait, il y a eu un renforcement des moyens qui ont été dédicacés à la CADA et cela coûterait peanuts d’avoir un renforcement qui permette d’assumer une CADA décisionnelle. Nous ne comprenons pas pourquoi il y a une telle obstination dans le fait de la majorité fédérale de ne pas vouloir faire la transparence totale et donner un pouvoir décisionnel à cette CADA.

En outre, au fédéral, il existe une CADA décisionnelle. Il en existe une pour ce qui a trait aux informations environnementales. L’expérience est donc déjà probante au niveau fédéral. Par ailleurs, il semble être un peu sorti des mémoires qu’il existe une proposition de loi Ecolo-Groen qui va exactement dans ce sens.

Traduite par notre groupe sous forme d’amendement, cette proposition a été jusqu’alors rejetée par l’ensemble de la majorité. Se pose donc la question de savoir si on a évolué, depuis trente ans que dure ce jeu de transparence. La réponse est évidemment non. En trente ans, au niveau fédéral, on n’a pas évolué. Certains ont des doutes et des suspicions. Je ne dis pas que ces suspicions sont légitimes, je j’en sais rien, mais on va laisser planer ces suspicions et ces doutes que des citoyens et des associations ont émis par rapport à un certain nombre de décisions de l’administration ou du gouvernement. On va continuer à les entretenir, insinuant de ce fait qu’ils sont probablement vrais puisqu’on ne veut pas nous donner accès à des documents et que la CADA ne peut pas contraindre les administrations ou les cabinets ministériels à fournir un certain nombre d’éléments de transparence administrative. Au lieu de rassurer, au lieu de rendre confiance, on entretient un climat de suspicion sur certaines décisions.

On apprend même sur le site de la CADA que certains membres du gouvernement, dans des affaires diverses, refusent d’obéir aux décisions de la CADA. Cela illustre combien il était important de renforcer cette transparence en permettant de contraindre les membres de ce gouvernement à rendre publiques les décisions demandées, ce qui n’est pas fait. Nous avons déposé un dernier amendement pour restreindre la portée de l’exception à la publicité des documents des cabinets ministériels. Nous avons essayé, après d’autres amendements, de trouver une voie plus médiane pour vous laisser une porte de sortie.

Tout à l’heure, lorsque nous avons examiné le projet de loi sur l’indemnisation des victimes de terrorisme, nous avons précisé qu’au moins, les renvois au Conseil d’État de ce projet de loi avaient permis au gouvernement d’entrer en collaboration avec l’opposition pour essayer d’obtenir un texte plus juste. Ici, par contre, jamais, à aucun moment, il n’y a eu d’ouverture de qui que ce soit dans la majorité pour nous inviter à travailler sur un amendement. Entre le tout et le rien, il y a peut-être une voie médiane que nous n’avons pas explorée.

Nous aurions pu, tous, sortir la tête haute de ce dossier mais le gouvernement est resté dans l’obstination permanente, jetant par ailleurs la suspicion sur toutes les décisions politiques et, par là même occasion, sur l’ensemble de la classe politique. Cela, nous ne pouvons évidemment pas l’accepter parce que nous ne participons pas à ce manque de transparence qui est déjà éprouvé dans les entités fédérées.

Ce n’est donc pas quelque chose d’exceptionnel que nous vous demandons de mettre en place. Il est dommage que nous n’ayons pas pu avancer sur ce dossier en profitant du temps qui nous était imparti par les renvois d’amendements au Conseil d’État. Nous le regrettons et nous ne pourrons évidemment pas valider votre projet.